Pierre Soulages / John Chamberlain

Vernissage
le samedi, 14 septembre 2024, de 18h à 20h

L'exposition sera accompagnée d'une publication disponible à partir d'octobre 2024.

La galerie Karsten Greve a le plaisir de présenter dans son espace parisien une exposition exceptionnelle dédiée à Pierre Soulages et John Chamberlain. A cette occasion sera dévoilé un corpus de peintures de Pierre Soulages et de sculptures de John Chamberlain, toutes issues de la collection personnelle de Karsten Greve, qui depuis plus de 50 ans joue un rôle clef dans la promotion de grands artistes contemporains, offrant une plateforme internationale à leur oeuvre. Cette exposition incarne sa vision en créant un dialogue unique entre deux figures emblématiques de l´avant-garde d´après-guerre, avec qui la galerie a collaboré pendant plusieurs décennies.

Chamberlain et Soulages plongent le spectateur dans une expérience visuelle et sensorielle riche, par des procédés en apparence opposés : assemblage de métal coloré pour l´un, larges étendues de peinture noire pour l´autre. Chacun à sa manière se fait toutefois explorateur acharné de la texture et de la lumière. Regard croisé entre deux maitres spécialistes de la matière dont ils redéfinissent notre perception, cette exposition exceptionnelle donne à voir la quête obstinée et solitaire de deux artistes résolument inclassables.

Maitre incontesté du monochrome noir qu´il exploitera sans relâche tout au long de sa vie, Pierre Soulages (1919-2022) est considéré comme l'un des artistes français les plus importants et les plus reconnus à l´étranger. Sa carrière est couronnée en 2014 par l'ouverture d'un musée à son nom à Rodez, sa ville natale ; en 2019, une rétrospective lui est consacrée au musée du Louvre, rarissime privilège que seuls auront connu de leur vivant Braque, Chagall et Picasso.

Après trente ans de peinture abstraite à dominante noire, Soulages se tourne en 1979 vers un nouveau style qu'il nomme Outrenoir. Littéralement « au-delà du noir », ce procédé est le résultat d'une longue recherche sur la texture et la morphologie de la peinture noire. Embrassant la viscosité de la matière par de larges coups de pinceau et autres outils qu´il fabrique lui-même, Soulages structure la surface de toiles monumentales, les transformant en reliefs picturaux qui captent et reflètent la lumière de différentes manières, conférant à la surface une qualité sculpturale.

L´exposition présente des peintures de Pierre Soulages réalisées entre 1963 et 2015, une rare occasion de pouvoir appréhender le fruit de longues années de recherches picturales. Les visiteurs pourront notamment admirer une très grande peinture de 1963 (gouache sur papier monté sur toile) signée et datée au recto et au verso. Initialement présentée lors de la Documenta III en 1964, il s´agissait de la plus grande peinture à y être exposée. De monumentaux Outrenoirs réalisés au cours des deux dernières décennies de l´artiste donnent quant à eux un aperçu de cette période très prolifique pour Pierre Soulages, durant laquelle il se tourne vers l´acrylique et approfondit son voyage au coeur du « noir-lumière ».

Coloriste exceptionnel et virtuose du métal, l´Américain John Chamberlain (1927-2011) fait de la tôle son arène. Ses sculptures se distinguent par des couleurs acides et des formes organiques, évoquant à la fois la force brute de l’acier et la douceur des draperies de la Renaissance. L'agilité du métal rend ses sculptures presque vivantes, dans une danse grésillante de courbes colorées et ondulantes. Formé au Black Mountain College, il jouit d´une solide réputation aux Etats-Unis et acquiert une reconnaissance internationale après avoir représenté son pays à la Biennale de Venise de 1964.

Remodelant, écrasant, assemblant et soudant sans cesse des bandes d'acier provenant de voitures abandonnées qu'il sélectionne et amasse dans son atelier, l'artiste travaille intuitivement afin de trouver le bon ajustement ou fit. Ce mot est souvent employé par Chamberlain pour décrire son processus : « les pièces peuvent toutes se ressembler, mais aucune n'est similaire. Il faut les assembler. Vous avez donc un ajustement (fit), une forme et une couleur ». Il se décrit lui-même comme un « collagiste », assemblant les pièces les plus disparates en une nouvelle structure, tout en préservant les propriétés initiales du support, y compris sa couleur.

Vivement intéressé par les différentes formes qu´un matériau peut prendre, Chamberlain étudiait les propriétés du métal pour affiner sa pratique, associant une approche scientifique à son travail artistique. Au-delà des pièces de carrosserie, il a aussi expérimenté le papier, le plastique, et la mousse de polyuréthane. Soulages comme Chamberlain correspond à cet archétype de l´artiste-chercheur : expérimental, acharné, guidé par une soif du noir jamais étanchée… « C´est ce que je fais qui m´apprends ce que je cherche » déclarait Soulages. Une manière de placer le faire et la découverte au centre de sa pratique, affranchie des mouvements artistiques de son époque. Dans sa quête de lumière, Soulages faisait cavalier seul.

Pierre Soulages et John Chamberlain jouissent depuis les années 60 d’une réputation et d’un succès solides dans leur pays d´origine et à l’international. Leurs oeuvres sont exposées dans les plus grands musées en Amérique comme en Europe, et sont présentes dans les collections de prestigieuses institutions, telles que le MoMA, le Guggenheim ou encore le Centre Pompidou.

Depuis leur première collaboration en 1973 pour Chamberlain et en 2002 pour Soulages, Karsten Greve a été un soutien indéfectible et promoteur passionné du travail des deux artistes. Cette exposition est aussi une occasion de célébrer leur relation solide et profonde : à travers des photos d´archives inédites, les visiteurs pourront découvrir des moments intimes et marquants de cette collaboration exceptionnelle. Des clichés pris lors de vernissages, de visites d´atelier, de moments plus personnels illustrent la profondeur de leur relation, témoignage du lien tout particulier qui unissait le galeriste et ses artistes.

« J´ai ouvert la galerie avec un intérêt pour les grands artistes solitaires, confie Karsten Greve. L´exposition Outrenoir de 2002 a été pour moi un signe que Soulages était un solitaire parfait. Chamberlain était aussi un solitaire. Les solitaires me conviennent toujours, ce sont des artistes qui ne sont pas membres d´un moment ou d´une société…c´est autre chose ».